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help peopleLors de mes recherches pour mon deuxième livre à paraître à l’automne, j’ai découvert un courant philosophique appelé le « care ». Au Québec, nous pourrions sans doute parler d’une « éthique du soin ».

Le care est une attitude autant qu’une activité: c’est la faculté de se soucier d’autrui et d’en prendre soin; de faire attention et faire une attention. Il s’agit d’une « morale de la proximité ». Dans notre société, on retrouve le care dans le domaine hospitalier, notamment.

Ce courant philosophique est né dans les années 1980.  Carol Gilligan, une psychologue sociale américaine, publie l’ouvrage Une voix différente (1982), dans lequel elle arrive à la conclusion qu’il existe chez les humains, une éthique qui ne s’appuie pas sur des grands principes (impartialité, règle, rationalité, justice) mais plutôt sur une attention aux situations particulières et aux besoins des individus (pragmatisme, sensibilité, observation, attention). Cette éthique n’est pas moins bonne ou moins évoluée, elle est seulement différente.

Le care est donc la capacité de percevoir les détails de la vie que nous négligeons habituellement, ce que l’on tient pour acquis ou que l’on juge sans importance. Il produit un travail souvent « invisibilisé », qu’on ne perçoit que lorsqu’il ne se fait pas (ex. tâches domestiques).

Dans nos sociétés modernes, ces activités sont dévalorisées. Pour Gilligan, la question est de savoir si elles le sont parce qu’elles sont traditionnellement accomplies par des femmes, ou plutôt si celles-ci en sont responsables parce qu’elles n’ont aucune valeur « marchande ». Cela soulève donc une question importante d’un point de vue féministe.

Pourtant, selon Joan Tronto, qui a analysé cette éthique dans un  livre intitulé Un monde vulnérable, pour une politique du care (1993),  le care a une pertinence politique indéniable. De fait, dans nos sociétés modernes où l’autonomie a la cote, la conscience de notre interdépendance et sa manifestation par des actes de sollicitude permettraient de construire des communautés plus humaines.

Si cette éthique m’a interpellée, c’est que la façon de considérer le temps comme un écosystème introduit dans notre rapport avec lui une dimension qui est rarement présentée par les théoriciens de la gestion du temps : le soin, l’attention et la sollicitude. Cette attitude permet, notamment, de faire durer un objectif atteint. Le soin se concentre sur la réalité : il est pragmatique et répond aux besoins et non à des normes extérieures. En cela, il aménage le temps avec bienveillance.

Je propose donc de lui donner une plus grande place. Le soin inscrit nos agirs dans un temps plus clément et durable en protégeant nos forces de telle sorte que nous ne nous épuisions pas à la tâche. Pour moi, ce soin va plus loin que le simple fait de prévoir du temps pour se reposer ou s’alimenter. Il nous permet de regarder notre temps avec bienveillance et d’installer dans nos vies les « accommodements  raisonnables» qu’il faut pour que nous y vivions plus à l’aise et heureux.

 

 

 

Pour aller plus loin : Sandra Laugier. « Le care : éthique, genre et société », Conférence de l’Université de Bordeaux-Ségalen, saison 2009-2010. [en ligne];  Fabienne Brugère. « Pour une théorie générale du care », La vie des idées, 8 mai 2009, www.laviedesidees.fr, [en ligne]

 

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