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© CLemaire

Nous avançons vers la nuit, « le temps noir et la période de la terre stérile ». La triade Halloween, Toussaint et Fête des morts étend ses racines dans les profondeurs celtiques. Ces fêtes n’ont pas grand chose de chrétien puisque, du temps de la jeune Église, les croyants étaient convaincus du retour imminent du Christ — pour le jugement dernier —  et ne se préoccupaient donc pas de savoir où allaient les âmes en attendant. Mais comme il tarde toujours, on leur a conçu une antichambre: le purgatoire. L’Église a donc récupéré une fête qui se vit depuis la nuit des temps, en lien très étroit avec la nature.

Ces trois jours sont bien particuliers. Ce sont des jours de transition entre une année qui se termine et l’autre, qui commence. Des jours vides, puisqu’ils n’appartiennent ni à la vieille année, ni à la nouvelle.  Chez les Celtes, le premier jour rendait hommage aux héros, le deuxième aux morts et le troisième avait l’allégresse d’un jour de l’an. Ainsi, la Toussaint fête ces héros chrétiens que sont « tous les saints » (et quelques saintes…), le 2 novembre reste la fête des morts puisque le phénomène est encore d’actualité et le Jour de l’An est remis à plus tard!

Ces  jours favorisaient l’éclosion du merveilleux. Une connexion se faisait alors entre le royaume des morts et le monde des vivants. Dans la nuit de la Toussaint, les bedeaux des villages de Normandie parcouraient les rues pour quêter de quoi apaiser les âmes du purgatoire. Sans l’aide des prières des vivants, les morts ne pouvaient pas accéder au paradis. Jugez donc de l’importance de cette responsabilité!

Au XVIII et au XIXe siècles, dans la vallée du Saint-Laurent, ces trois jours sont avant tout des fêtes religieuses. L’Halloween, plutôt nommée « veille de la Toussaint », est vécue dans la crainte et le recueillement. De fait, on pense que, cette nuit-là, les morts peuvent revenir hanter les bonnes gens de leurs villages. Au souper, on laisse donc un couvert pour ces éventuels revenants. Le lendemain était un jour férié où on évitait de labourer la terre « car il coulerait du sang dans les sillons ».

Le vernis que l’Église a mis sur ces trois jours a mal tenu. Il écale par endroits et laisse de grandes plaques de paganisme  et de merveilleux. Si ce n’était de tout ce qu’il faut acheter de déguisements et de décorations pour fêter l’Halloween, nous serions très proches de nos ancêtres.  Les jours sont de plus en plus courts et, pour tromper la peur, nous rions, nous festoyons, nous imaginons.

Un grand trou se forme alors dans le temps, une déchirure immense et folle entre le ciel et la terre, la nuit et le jour, la mort et la vie, l’insolite et la raison, le passé et le présent. Un trou par lequel nous pourrions nous échapper et nous remettre à rêver.

 

Sources: DELEURY. « La Toussaint », Les fêtes de Dieu; la foi, l’histoire, les mythes, Paris, Philippe Lebaud, 1994, pp 207-230. PROVENCHER, Jean. Les quatre saisons dans la vallée du Saint-Laurent, Montréal, Boréal, 1988 (réédité en 2010), p. 291-398.

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