Le temps est multiple, disions-nous? Mais voyons! Le temps est unique, il nous est compté, il nous glisse entre les doigts! Voici pourtant un exemple d'un autre rapport au temps…
Je viens de terminer un livre décapant : Le cheval et l’âne au bureau. L’art oublié de travailler ensemble*. Son auteur, Olivier Schmouker, est blogueur pour Les affaires.com. Ses articles de blogue présentent des études qui mettent à mal les préjugés et les pensées toutes faites dans le monde des affaires. Son livre porte la même intention. Mais sans le goutte-à-goutte du blogue, l’effet s’apparente à un traitement de cheval!
Pourquoi ce titre? Olivier Schmouker nous raconte d’entrée de jeu cette fable de Lafontaine où un âne demande à un cheval de partager sa charge, parce qu’il n’en peut plus. Mais le cheval est orgueilleux et individualiste : il refuse, considérant cette tâche comme au-dessous de lui. Ainsi, l’âne meurt d’épuisement et le cheval se voit obligé non seulement de porter la charge de l’âne, mais aussi sa dépouille. L’individualisme et le manque d’esprit d’équipe ne datent donc pas d’hier!
Dans les milieux d’affaires, la structure hiérarchique de forme pyramidale est encore très populaire. Si elle est si appréciée des dirigeants d’entreprises, c’est qu’elle leur parait plus efficace : les décisions se prennent plus rapidement à un qu’à tout une équipe. Et on peut davantage contrôler les résultats. De plus, tous ces fougueux « pur-sang » adorent déléguer les tâches plus monotones à leurs subalternes. N’ont-ils pas travaillé des années pour atteindre le sommet? Enfin, s’ils ne sont pas tout en haut, qui croira qu’ils sont de vrais leaders?
Or, dans son livre, Olivier Schmouker décrit comment les hiérarchies en triangle gagneraient, dans bien des cas, à être transformées en ‘cercles’ où le pouvoir circule plus librement d’une personne à l’autre peu importe le poste qu’elle occupe. L’auteur, s’appuyant sur de multiples cas précis, démontre que des valeurs comme l’esprit d’équipe, l’humilité, l’altruisme et l’empathie sont davantage favorisées par une telle structure. Et il ajoute que ces qualités font des merveilles, tant en terme de climat de travail qu’en termes de résultats financiers.
Dans de telles structures, les employés sont, par la force des choses, beaucoup plus autonomes et responsables. Ce qui fait mentir le vieil adage qui veut que si on n’identifie aucun responsable, personne ne l’est. Quand il est établi que tous sont responsables d’un projet, celui-ci profite des talents et de la motivation de tous et toutes. Bienvenue dans le temps mosaïque, où le temps du projet obtient la priorité sur le temps des personnes.
Enfin, dans de telles structures, les décisions sont prises par consensus. Et le consensus appartient au temps panoramique. Si, de l’avis général, il est plus long et souvent plus difficile d’arriver à une décision collective, ce temps « perdu » à se mettre d’accord est largement compensé par l’efficacité de l’action qui suivra. Car on sait alors que tous auront à cœur de mettre cette décision en pratique, parce qu’elle est un peu la leur, ayant été prise par eux et non contre eux.
À d’autres façons de faire, proposons d’autres rapports au temps!
* RÉFÉRENCE: SCHMOUKER, Olivier. Le Cheval et l’Âne au bureau. L’art oublié de travailler ensemble, Montréal, Les Éditions Transcontinental / Les affaires, 2013, 203 p.
Le balancier vers les équipes qui fonctionnent au consensus doit aussi tenir compte de l’obligation de résultats un moment donné… Si dans l’équipe il y a quelqu’un qui bloque tout, tout le temps, c’est frustrant pour un grand nombre à cause d’une seule personne. Les conflits de personnalités ou autre comportement difficiles peuvent bousiller le travail d’équipe consensuelle.
Mais, oui, quand tous participent aux décisions, à l’avancement des dossiers, cela se fait dans une atmosphère de plaisir et la productivité s’en trouve souvent améliorée. Le bon dosage en tout temps et pas de recette miracle qui peut servir à toutes les sauces…