Un objectif s’élabore dans un espace bien circonscrit que les théoriciens de la gestion du temps nomment «zone d’influence*». Cette zone délimite les domaines et les lieux où nos actions peuvent…

Demain, c’est la Sainte Catherine. Cette fête, qui remonte au Moyen Âge, provoque chez moi un malaise. Je me demande en effet si j’aurais eu le sens de l’humour ou d’autodérision nécessaire pour « coiffer Sainte Catherine ».
Au Moyen Âge, on avait l’habitude, avant de faire faire des processions aux statues, de les vêtir et de leur faire porter un chapeau (une coiffe). Comme Catherine veut dire « pucelle », seule une vierge avait le droit de la coiffer. Au Québec, cette tradition de la « fête des vieilles filles » s’est poursuivie jusqu’au XXe siècle. Notre recette de « tire Sainte Catherine » nous viendrait de Marguerite Bourgeoys elle-même!
Mais, pourquoi insister sur la virginité des femmes et non pas sur celle des hommes? Y a-t-il une fête des vieux garçons? Quel remède peut apporter la moquerie lorsque le statut de célibataire n’est pas souhaité? Bref, je soupçonne cette fête joyeuse d’avoir été un calvaire pour beaucoup de femmes.
De l’humour, il en fallait pour celles que l’on montrait du doigt une fois par année. Ma tante Louisa avait l’habitude de dire que son « mari était mort au berceau ». Était-ce un réflexe d’autodéfense qui lui avait fait tourner ce mot d’esprit?
Ceci dit, le personnage de sainte Catherine est beaucoup plus riche que ce que peut laisser voir une statue coiffée. Elle aurait été vierge et martyre, mais dans la tradition chrétienne, ce n’est pas quelque chose d’original. Ce qui l’est davantage, c’est qu’on la disait intelligente et qu’elle serait la seule sainte du paradis à porter trois auréoles: la blanche des vierges, la rouge des martyres et aussi la verte des docteurs.
Catherine d’Alexandrie, qui a vécu au début du IVe siècle, était une érudite et elle aurait eu des débats théologiques avec les « philosophes païens ». C’est pourquoi elle est la patronne des théologiens, des philosophes et des orateurs. Au XIVe siècle, une autre Catherine — de Sienne, celle-là — sera aussi nommée « docteur de l’Église ». Comme les docteurEs de l’Église sont rarissimes, je me demande s’il n’y avait pas obligation de s’appeler Catherine… ou Thérèse*.
La Sainte Catherine est aussi une fête du cycle des saisons. Au Québec, la fin novembre clôt les travaux agricoles. Comme les trois jours de la Toussaint, la Sainte Catherine célèbre la fin de l’année. Après, débute la longue attente de décembre pour aboutir au retour de la Lumière et au Nouvel An. Ces événements s’étirent sur cinq semaines, ils ne se réduisent pas en une veille et son lendemain; ils permettent à la pensée de se poser, un regard en arrière, un bilan avant d’entreprendre les travaux de l’année nouvelle.
La fête de la Sainte Catherine est bien adaptée à notre climat québécois: notre hiver commence bien davantage le 25 novembre que le 21 décembre. À la Sainte Catherine, les froids sont là pour rester.
Sortons donc nos tuques et coiffons Sainte Catherine!
* Les autres docteures sont Thérèse d’Avila et Thérèse de Lisieux.
Lecture complémentaire: Les fêtes de la nuit
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