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CC Madeline Tosh

À  « Tout le monde en parle », le 31 décembre dernier, Maxime Morin (DJ Champion) racontait qu’après l’expérience du cancer, la récupération au niveau psychologique se faisait plus lentement qu’au niveau physique. Son plus grand défi, a-t-il dit, est de « rester vivant », c’est-à-dire de garder les bonnes habitudes acquises pour rester en santé.  Dans le sens de ses propos, j’ajouterais: pour garder à l’esprit la leçon reçue. Il se désolait qu’avec la reprise du travail, les mauvaises habitudes reviennent.

Jeudi dernier, à l’émission « Bazzo.tv », Pénélope McQuade évoquait les mois qui ont suivi son grave accident de la route, au cours desquels toute son énergie était consacrée à survivre et à recouvrer la santé. Elle aussi faisait référence à la difficulté de rester dans cet état d’esprit où tout ce que nous faisons a du sens. La vie qui reprend ramène les milles obligations auxquelles nous nous conformons et qui nous éloignent de nos bonnes résolutions.

J’ai vécu exactement la même chose. Ayant eu un cancer du sein, j’ai passé le plus clair de mon année 2009 à me soigner. Rien d’autre n’avait d’importance. J’avais alors l’impression d’être très proche de l’essentiel; le corps, l’esprit et l’âme complètement happés par le seul fait de vivre. Quand on traverse ce genre d’épreuve, on réalise que, tout compte fait, l’essentiel, c’est très simple: être avec les gens qu’on aime, regarder de tous ses yeux, respirer à pleins poumons et vivre.

Mais, avec la santé, reviennent les milliers de petites choses qui nous écartent de ces sentiments intenses, de ce sens profond des choses. Nous avons alors conscience que quelque chose nous glisse des mains, sans que nous parvenions à le retenir. Maxime Morin et Pénélope McQuade avaient tous deux cet étrange regret dans la voix: le sentiment très paradoxal d’avoir, en recouvrant la santé, perdu quelque chose d’autre… quelque chose d’important.

La maladie nous force à vivre dans un autre rapport au temps. Il s’agit d’un temps sacré, un temps à haute teneur spirituelle. Un temps qui nous ramène à la base de ce que nous sommes: des êtres vivants, en relation. L’épreuve nous fait perdre le contrôle de notre vie et le remplace par un tel sentiment de vulnérabilité, qu’elle nous « réveille », nous extirpe du temps contrôlé, mesuré, rationnel.

Nous n’avons plus rien à planifier: à quoi bon, puisque nous nous sommes mis à douter de notre avenir. Nous n’avons plus qu’à essayer de comprendre pourquoi nous en sommes arrivés là. Et chercher, ici et maintenant, ce qui nous lie à la vie.

Ce temps sacré est ce que je nomme le temps à double fond. Un temps qui, en temps ordinaire, est fugitif;  un cadeau que nous n’attendions pas, une sensation soudaine d’être totalement vivant, en harmonie parfaite avec l’univers, exactement là où nous devons être. C’est un temps ouvert sur le centre, sur le coeur. Et c’est un temps qui ne se vit qu’au présent.

Or, la maladie a ce mérite: nous faire entrer complètement dans ce temps à double fond. Alors, il ne nous effleure plus, il nous prend à bras le corps, il nous happe. Dans ce rapport au temps, rien n’est plus essentiel que de vivre, tout simplement. Et, oui, quand la vie ordinaire reprend, une impression de paradis perdu nous envahit, nous faisant comprendre qu’il y avait là une qualité du temps à laquelle nous n’avons plus accès.

Je suis convaincue qu’il n’y a pas que la maladie qui nous offre cette opportunité d’ouvrir le temps pour aller toucher à son éternité. Mais la maladie est la plus « efficace » pour nous faire faire ce trajet. Elle nous enlève tout, du jour au lendemain: nos certitudes, notre sentiment de puissance, notre sentiment d’immortalité. Elle nous ouvre les mains, à tel point qu’alors, le temps peut s’offrir sans mesure et gratuitement.

Cet article comporte 2 commentaires

  1. Quelle justesse dans les propos! Il faut avoir traversé la maladie pour s’exprimer de cette manière. Je suis moi-même atteinte du cancer de la vessie qui est tenace et malgré les traitements et chirurgies reçus depuis 5 ans, il refait toujours surface.
    Je me demande quand j’en viendrai à bout mais je garde espoir de le vaincre un jour.

    Les questions relatives à ma vie, ma mission sur terre et le temps qu’il me reste sont très présentes à mon esprit.

    J’avoue que depuis 5 ans, j’ai énormément changé ma relation au temps et ma manière d’aborder mes journées. J’ai arrêté de travailler et je m’efforce de faire le principal en accordant moins de temps au ménage et autres choses auxquelles j’accordais trop d’importance pour me consacrer à l’essentiel, soit profiter de mon temps et faire ce qui me tente le plus souvent possible.

    J’ai conservé les activités qui me rendent heureuse et je remercie le Ciel pour chaque journée qui m’est donnée.

    Merci Christine pour ces magnifiques textes qui incitent à réfléchir et nous aident à remettre les pendules à l’heure.

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